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Deuzeffe pose (toujours) des questions

14/03/2013 14:19

Pour rire ?

Deux monastères se font face, chacun posé à flanc de colline. Au fond de la vallée, une rivière, large, presque un fleuve et au milieu, dans l'exact alignement des deux domaines religieux, une île. Riche d'alluvions, de végétation, elle est l'objet, depuis plus que longtemps, de combats acharnés mais feutrés entre les deux communautés. Pensez donc ! La limite entre les deux domaines, c'est la rivière, et l'île est au milieu : elle fait partie de la frontière, donc d'aucun des deux donc des deux.

Sur la rive droite, l'abbaye sert de lieu de repos et de retraite aux jésuites, entre deux missions. Le silence compassé y règne, entre temps de prières et temps de discussions philosophiques. Autour, une vaste forêt, propice au recueillement et à la méditation. Sur la rive gauche, un monastère bruyant, bruissant de vie, entourés de vastes champs rudement exploités : des franciscains s'y sont établis. Mais quand les deux congrégations, lors d'une promenade, se retrouvent face à face, au niveau de l'île, il n'est plus question ni de Dieu, ni de maître et c'est la curée[1] ! Jusqu'au jour où on compte un mort partout et où les deux pères abbés décident que ça suffit comme ça, qu'il y en a assez et qu'on va régler ça à la loyale.

Les deux communautés désignent chacune leur champion : le plus fin lettré et habile en rhétorique pour les jésuites, l'esprit le plus pur et le plus simple pour les franciscains. Ces derniers imposent une règle supplémentaire au combat, qu'il soit silencieux (sont pas fous : ils savent qu'ils n'ont aucune chance de gagner si la bataille se fait sur le terrain de la parole) : les jésuites hésitent un peu, mais forts de leur supériorité intellectuelle, acceptent.
Au milieu d'une clairière en terrain neutre, voilà donc nos deux champions en lice. Le sort a désigné le jésuite pour engager. De sa poche profonde, lentement, il sort une pomme. Son adversaire, farfouillant dans sa besace en grommelant, lui tend un quignon de pain. Le jésuite avance alors son poing fermé à la face de son adversaire, seul son pouce restant dressé. Le franciscain lance sa main à l'horizontale, l'index et le majeur écartés en V tendu en avant. Le jésuite déploie alors le pouce, l'index et le majeur sous le nez de son concurrent. Ce dernier claque sa main droite bien à plat sur son poing gauche fermé. Le jésuite dit «Mon frère, vous avez gagné, l'île est à vous.»

Le jésuite rentre penaud au milieu des siens qui le pressent de lui expliquer ce qu'il s'est passé pour comprendre comment ils ont pu se faire berner ainsi. « Je lui ai montré la pomme du pécher originel, il m'a offert le pain de la rédemption. Je lui ai opposé le un de l'unicité, il m'a rétorqué le deux de la dualité, je lui ai montré le trois de la trinité, il m'a répondu avec l'autel de la communion. » Le père abbé admet que les jésuites ont perdu...
Dans le monastère franciscains, c'est la liesse, et là aussi on est impatient de connaître le déroulement du combat vainqueur. « Il a sorti une pomme, j'ai cru qu'il voulait casser la croûte, alors j'ai sorti mon morceau de pain. Il m'a fait j'te crève un œil, j'lui ai fait, j't'en crève deux, il m'a fait, j't'en crève trois, et j'lui ai fait t'es baisé, j'en ai qu'deux ! »

Note

[1] Même pas honte

08/03/2013 00:00

Féministes ?

Il y a des féministes qui m'énervent. Par exemple ces groupes qui manifestent avec agressivité voire violemment. Comme s'ils n'avaient pas assez d'imagination pour utiliser autre chose que ce qu'ils reprochent aux hommes, leur violence et leur agressivité (la faute à la testostérone). « Tiens, tu vas voir ce que ça fait ! », œil pour œil - dent pour dent, toussa. Minable. Comme si la violence pouvait être la réponse à la violence, alors qu'elle n'appelle que le même écho. Isaac disait que la violence est le dernier refuge de l'incompétence et Vladimir qu'elle est une force faible. Dont acte.

Il y a des féministes qui m'exaspèrent ; ces personnes qui font supprimer la case « Mademoiselle » des formulaires administratifs, alors que ce sont toutes les cases « Civilité » ou « Sexe » qu'il faut supprimer : un individu c'est un prénom et un nom (pour un formulaire) et c'est tout. Tiens, demandez-vous dans quel cas, la mention du genre est indispensable à connaître dans un cadre administratif : je n'en ai pas encore trouvé... D'autres personnes qui se révoltent contre les jouets ou les confiseries sexués mais que je n'ai beaucoup entendu se plaindre contre ses saloperies de pub pour la lingerie qui chante le matin sous le balcon.

Il y a des féministes qui m'horripilent. Entre autres ces individualités qui, au nom de l'indifférence à la différence, refusent que soient traités de façon différenciée les femmes et les hommes (ne cherchez pas de suprématie dans l'ordre des termes, sauf celui alphabétique...) dans tous les cas. À ce compte là, on supprime le congé maternité et on ne réclame pas un congé allaitement, puisque, hein, on ne pas faire de différence entre les sexes (et celle-là, c'est vraiment la seule qui existe objectivement ;p). Ces mêmes qui n'acceptent pas de reconnaître que oui, en moyenne (statistique qui ne s'appliquent pas à l'individu, je suis d'accord), les hommes sont plus grands et plus forts et que l'on trouve donc dans les casernes plus de pompiers que de pompières...

Et puis, et puis, il y a des féministes que j'aime, les autres. Ces autres que l'on entend pas dans lémédias ou qui ne hurlent pas en public ; qui dans leur vie quotidienne, communautaire au travail ou à la maison, savent choisir les mots, les attitudes, les actes, les mimiques qui signifient une attention à la différence... individuelle, qui accordent le droit à leur prochain d'être ce qu'il est, d'avoir les envies et les désirs qui le combleront, qu'ils soient dits féminins ou masculins...

- Maman, je peux t'aider ?
- Tu veux pas plutôt participer aux tâches collectives et communautaires, comme tout le monde ?

25/12/2012 10:29

De circonstance ?

J'ai retrouvé, en fouillant dans les cartons de mon grenier, le livre de vie de mon ancêtre Joël Noyeux, transmis de parents en enfants jusqu'à moi. Un 25 décembre, il a relaté l'histoire qui suit :

En ces temps sombres, les troubles de notre pays sont engourdis par le gel et la neige : nous sommes refugiés au plus chaud de nos maisons de granite gris dans nos villages isolés par la tempête. Les hommes mûrs ne sont pas revenus des frontières lointaines ; nos foyers survivent chichement alimentés par les enfants, les femmes, les vieux sages et les imagos.

Je viens d'être désigné jeune sage ; je ne le mérite certes pas : seuls les temps obscurs justifient cette distnction, d'après moi. Et ce jour, un jeune garçon, d'une dizaine d'années, m'a demandé :

- Dis, à Noël ou à l'anniversaire, pourquoi offre-t-on des cadeaux aux enfants ?

Bon sang ! Pour mon baptême de sage, je suis servi ! Non seulement, mon premier hôte est un enfant, non seulement il parle de ce que nous allons avoir du mal à réaliser vu notre misère matérielle, mais en plus il veut discuter d'emblée de mystère.

Je plonge mes yeux dans son profond regard gris, avide, candide, ouvert à toutes les réponses du monde, en quête de connaissances joyeuses et rassurantes. Je n'ai pas le droit de me tromper, de le tromper. Il faut que je m'élève à son niveau, dépouillé, simple, sans fioriture ni faux-semblant. Il n'a cure des embellisements que les adultes prétendent utiliser pour expliquer le monde qui les entoure. Il rejette sans vergogne les théories des initiés. Il me regarde, simplement, avec sérénité.

Et dans ses yeux
Je lis
La réponse
Qu'il porte en lui
Sans le savoir.

Je comprends alors ce qu'est vraiment être sage : je ne vais faire que lui dire à haute voix ce qu'il sait déjà, je vais simplement conduire hors de lui, pour que sa conscience s'en empare, la connaissance qu'il a en lui.

- Nous offrons des cadeaux aux enfants pour les remercier.
- Pour les remercier ? Mais de quoi ?

Allez mon grand, allez. Continue, pose tes questions, à moi, à toi. Vas-y, cherche la réponse, elle est rangée quelque part dans ta mémoire, trouve-la !

Le gris de ses yeux prend soudain des reflets mordorés, il m'offre un large sourire et me dit : " On les remercie d'exister, d'avoir la chance de pouvoir les connaître. Mais dis, pour les adultes, c'est pareil, non ? Même le plus méchant, comme la vieille Némie au bout du village, peut nous apprendre quelque chose, c'est ça ? Et ils nous apprennent des choses du monde lointain ou tout proche, comme nous-même. C'est ça, hein dis, c'est ça ? Alors, plutôt que leur dire un "Merci" que le vent emportera peut-être loin de leurs oreilles, on leur donne un objet qu'ils feront sien et dans lequel on aura mis un peu de nous, comme ce sifflet que j'ai fait et donné à Claudine pour qu'elle puisse appeler ses bêtes sans se fatiguer. C'est ça, hein dis, c'est ça ? Et puis si Pierrot casse le petit moulin que je lui ai fabriqué, c'est pas grave : il aura pu jouer avec au moins un peu. C'est ça, dis, c'est ça ? Mais, et ceux qui ne reçoivent jamais de cadeaux ? Dis, c'est pas parce qu'ils sont méchants, c'est seulement parce que personne n'a la chance de les connaître, alors il faut aller à leur recherche ? C'est ça, hein dis, c'est ça ? " Et toujours ce regard assoiffé qui est planté dans mes yeux. Et tout d'un coup, cette estocade : " Dis, qu'est-ce qu'il faut faire pour devenir un sage comme toi ? "

Je le regarde alors avec un grand sourire plein de larmes, je plonge ma main dans ma poche et j'en sors les fragments de silex et de quartz roulés par la rivière dans le lit de laquelle je les ai récoltés ce matin, ma main tendue les lui offre. " Merci. "

24/11/2012 19:50

Ressentir ou penser ? Ou les deux ?

L'art purge, donc. Il évacue les bouffées de violences envahissant l'être humain, lui permet ainsi de supporter la pression de la société.

Si la catharsis d'Aristote désigne la transformation de l'émotion en pensée, la monstration d'images de vraie violence engendre le mouvement contraire et la pensée se dissout dans l'émotion.

Alain Korkos in Esthétique de la violence - 24 novembre 2012

11/11/2012 19:17

Vous pouvez reprendre une activité normale

J'ai fini de coller mes post-it de l'été et du début de l'automne. Devraient logiquement suivre quelques articles un peu plus consistants en rapport avec l'actualité[1]. En attendant de les lire, tu peux toujours aller penser chez Grumpfff, te régaler de mots chez Luc ou aller réfléchir avec les chroniques de Laurent.

À bientôt.

Note

[1] et décalés - forcément - à cause du temps qui passe

Navrance de l'algorithmie

C'est navrant de trouver une solution laide qui marche mieux {qu'une solution élégante}
(Bernard Chazelle)

10/11/2012 18:30

Repaire et repère

Lorsque quelqu'un n'a pas de points de repère extérieurs à quoi se référer, le tracé même de sa propre vie perd de sa netteté
(Orwell)

Hiatus

Le problème avec le monde, c'est que les gens intelligents sont pleins de doutes tandis que les plus stupides sont pleins de confiance
(Bukowski)

Jusqu'au bout !

La vérité de demain se nourrit de l'erreur d'hier
(Antoine De Saint-Exupéry via @Grumpfff)

Jusqu'au bout ?

Allons jusqu'au bout de nos erreurs sinon nous ne saurons jamais pourquoi il ne fallait pas les commettre
(Bernard Werber)

09/11/2012 18:21

Ose !

La boussole est formelle : pour que l'on OSE, il suffit de perdre le Nord
(J.-C. Chazelon)

07/11/2012 18:18

La fusion des sens

C'est parce que j'ai le nez bouché que je n'ai pas entendu que c'était allumé
(@micercle)

05/11/2012 18:14

Pourquoi relire ?

Cinq mots. Qu'on ne se lassera jamais de relire. Comme si c'était la première fois. À chaque fois. Juste cinq mots.

03/11/2012 18:11

Naturellement

Chaque flocon de neige est comme le rêve d'un dieu : fugace, indéchiffrable - mais nous avons perdu la capacité de lire ces silences
(@fabricecolin)

30/10/2012 17:20

Lenteur bénéfique

Penser longtemps le texte au lieu de pouvoir l'écrire est le meilleur des tamis
(Erri De Luca via @Grumpfff)

Double sens

D'abord ils vous ignorent, puis ils se moquent de vous, puis ils vous combattent, puis vous gagnez
(Gandhi)

28/10/2012 17:13

Comme tout ce qui se partage

Le bonheur est quelque chose qui se multiplie quand il se divise
(Paulo Coelho via @Grumpfff)

27/10/2012 17:11

If it works. If...

Ah si ! Ça marche. Mais faut attendre que ça marche
(@micercle)

Toujours aussi simple

Pour être heureux, il faut penser au bonheur d'un autre
(Gaston Bachelard via @Grumpfff)

26/10/2012 17:01

Médiocre moyenne

I can't understand people who aims at being the average man with an average life. Life's too short and funny to have mediocrity as a goal
(@fdevillamil)

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