Récemment, pour répondre à une enquête interne sur les moyens de transport utilisés pour faire les trajets domicile-travail, j'ai évalué ma « facture carburant » mensuelle.

Données :

  • véhicule (6 ans d'âge) consommant 6 litres de gas-oil pour 100 km parcourus (c'est « l'ordinateur de bord » qui l'indique) ;
  • 30 km parcourus par jour (12 km domicile-travail x 2 + 3 km transport scolaire x 2), 5 jours par semaine ;
  • 20 km par semaine pour trajets divers (courses, loisirs, etc.) ;
  • soit un total mensuel de ((30 x 5) + 20) x 4 = 680 km et donc 40,8 litres de carburant ;
  • en prenant le plus haut prix du carburant au cours des 3 dernières années écoulées, atteint en octobre 2018 (ici) c'est à dire 1,541 €/L cela produit une facture d'environ 63 €/mois (un peu plus de 400 balles, diront les gens qui ont connu les nouveaux francs). Allez, disons 70 à 80 €/mois en comptant très très large.

Mais alors, les « 200 €/mois que coûte le carburant quand on travaille à 20 (ou 25) km de chez soi », affirmé par des représentants politiques ou indiqué par des manifestants (impossible de retrouver le récit d'une dame des ronds-points qui le mentionnait, publié dans un quotidien...), d'où sortent-ils ? Je n'ose imaginer que les balles-euros ont été confondues avec les balles-francs...

Je comprends vite, mais il faut m'expliquer longtemps. Et j'aime bien expliquer à moi-même.

  • 1re hypothèse : même conditions que mes données mais 50 km/jour (un AR/jour) -> 100 euros
  • 2e hypothèse : 100 km/jour (2 AR/jour) > 200 euros. Ah ! Une piste. Je ne sais pas si je serais capable de faire entre 4 et 6 heures de bagnole par jour juste pour rentrer manger chez moi à la pause méridienne. Je rappelle que j'ai considéré le prix le plus haut pour le carburant (ce qui n'est pas très réaliste, j'en conviens.)
  • 3e hypothèse : véhicule essence, 50 km/jour, prix le plus haut du carburant (toujours pris ici) 1,634 €/L pour le SP 98 (adapté pour les vieilles voitures) en octobre 2018, voiture de 14 ans d'âge qui consomme 7,8 L/100 km (voir ici) -> 140 €/mois. Inutile de dire que cette hypothèse d'une veille voiture essence ne me semble pas réaliste (sans parler du prix moyen du carburant, hein)
  • 4e hypothèse : conditions de vie dites « non-standard », horaires décalés, saucissonnés, par exemple. J'ai trouvé une telle situation décrite dans un article de février 2013 qui cite un cas. Effectivement, ce n'est pas un emploi de bureau classique : des horaires différents chaque jour, de grandes amplitudes coupées par de grandes plages sans travail. Donc 9 à 10 AR/semaine (pour un emploi à temps partiel de 20 h, excusez du peu !) entre le domicile et le lieu de travail éloignés de 30 km. Ce qui entraîne un plein tous les 800 km ; c'est ce que je fais aussi. J'en déduis que le véhicule utilisé est un diesel qui consomme à peu prés 6 L/100 km. Et en février 2013, il semblerait le prix du gasoil approchait celui d'octobre 2018 (mais un peu moins selon l'INSEE.) Quoi qu'il en soit, la facture carburant est de 150 à 200 €/mois suivant les années (le graphique de l'INSEE est très éclairant — attention, il s'agit d'indice — base 100 en 2015 — et pas du prix à la pompe).

Donc, pour les affirmations du politique sus-cité, soit il ne prend en compte que le prix d'octobre 2018 (pas représentatif de l'évolution du prix des carburants), soit il considère une voiture récente qui roule au SP98 et qui consomme énormément beaucoup au 100 km, soit il envisage uniquement ces situations apparemment extrêmes et pourtant répandues, semble-t-il, soit... je laisse le lectorat libre de compléter.

J'aimerais bien rencontrer la personne qui est obligée de débourser ses 200 €/mois de carburant pour aller travailler à 20-25 km de chez elle. Histoire de comprendre (et de savoir si j'ai bon ou pas.)

Évidemment, si les données statistiques sur lesquelles je me suis appuyée ne sont pas fiables, ma réflexion ne tient plus la route...