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Deuzeffe pose (toujours) des questions

Mot-clé - Neil Jomunsi

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15/01/2017 11:40

Kappa16 (Neil Jomunsi)

Kappa16 Comme d'autres, j'ai assisté à la conception et à l'assemblage des premières pièces de Kappa16, une journée de février 2015, au cours d'un voyage sans fin, une circumnavigation, un combat avec les mots et le temps. Quelques heures — vingt-quatre — et mots plus tard, le prototype était opérationnel, une « science-fiction robotique » mais « Pas forcément la meilleure chose que j’aie jamais écrite » d'après l'auteur. C'était aussi mon avis quant à ce premier jet.

Pourtant l'abord était intéressant : histoire d'un robot, particulièrement autonome, du point de vue du protagoniste lui-même. Comment ça, les intelligences artificielles n'ont pas de conscience ? Pourtant entre la découverte de sa probable localisation chez Homo sapiens et les travaux de Stanislas Dehaene, elles ne sont pas loin d'en être pourvues. Faire entrer ainsi le lecteur dans la peau, tout artificielle qu'elle pût être, d'un robot s'annonçait comme la promesse d'un beau voyage. Sauf que, patatras, le cours de la vie de Kappa16 faisait voler en éclat les préceptes du maître de la robotique[1]. Damnède, non, non, non, ce n'est pas possible ! M'enfin, un auteur a bien le droit d'écrire ce qu'il veut, la lectrice n'est ni obligée de lire ses histoires, ni de les aimer.

Quoi qu'il en soit, après quelques mois d'affinage, de peaufinage, de polissage, d'améliorations, d'amendements et de réécriture, le Kappa16 nouveau était né, chez Walrus[2]. Et je dois dire que la maturation du droïde a eu du bon. Enoch, le robot de modèle Kappa16 dont il est question, prend de l'épaisseur et de la profondeur et devient le héros d'une histoire résolument humaniste. Curieux pour un robot, n'est-ce pas ? Écoutez-donc ce qu'il dit :

À force de vivre en compagnie d’un autre, on finit par adopter des comportements mimétiques. Je sais cela. Je fonctionne de la même manière : j’observe, je copie. Je suis une machine à reproduire.

C'est bien le mécanisme de l'apprentissage par imitation ou de l'empathie ou la base de la relation. Certes, ce n'est pas uniquement humain mais plus généralement animal. N'empêche. De plus, une fois sa faute commise[3], l'androïde passe, comme tout un chacun, par une phase d'introspection, douloureuse, solitaire, sombre, très sombre, et il en sort victorieux de ses propres turpitudes. Et peut-être davantage... humain. Curieux d'ailleurs, que notre esprit ne puisse imaginer des androïdes autrement qu'anthropomorphes quant à leur apprentissage et à leur psyché[4].

Comme l'histoire est imprégnée de shintoïsme cher à l'auteur

En japonais, #MOTTAINAI décrit le regret devant le gâchis, la désolation face à la dépense utile — d’argent ou d’énergie —, la tristesse liée à la vanité de nos actions irrémédiablement vouées à l’échec et à l’oubli.

Kappa16 constitue un plaisant manuel de philosophie personnelle.

Notes

[1] Isaac Asimov

[2] Comme dit Valery, c'est presque de l'autoédition ^^

[3] parce qu'il n'est pas parfait, malgré les talents de son créateur et que donc il est faillible, malgré ce que dit Asimov

[4] oui, j'ose...

27/09/2014 22:12

Jésus contre Hitler (Neil Jomunsi)

j-vs-h.png Alors que le Projet Bradbury débutait sa vie, Walrus faisait paraître le dernier épisode (et l'intégrale) de Jésus contre Hitler. Profitant des largesse de l'éditeur, je me suis offert, pour le Noël suivant, l'épisode 1 et je m'apprêtais à acheter l'intégrale lorsque survint le Ray's Day et l'occasion de bénéficier ce jour là de la générosité de la maison d'édition. Bref, JvsH ne m'a rien coûté, ce qui va m'obliger d'user de moyens honteux — et donc inavouables — pour que l'auteur puisse déguster des bretzels au petit-déjeuner.

Ceci étant posé, quel est donc cet OÉNI[1] ? D'abord, vous prenez Chapeau melon et bottes de cuir, Les mystères de l'ouest et X-files et vous secouez. Très énergiquement. Encore plus que ça. Vous laissez à peine reposer et ajoutez, en larges rasades, une grande diversité de mythes et légendes, millénaires, exotiques ou littéraires. N'ayez pas peur de touiller ensemble zombies, magies noires, Cthuluh, Yéti, forces occultes (n'hésitez pas à forcer sur la dose), super-héros, militaires, agence ultrasecrète, amour (si si), Dante, des Ninja (enfin, surtout une), et surtout énormément de relations humaines, d'amitié et, n'osons pas peur du paradoxe, d'humanité. Vous aurez alors une vague idée de ce que vous vous apprêtez à dévorer. Parce que, bien sûr, vous ne pourrez vous empêcher de passer à la page suivante, de vous plonger dans l'épisode d'après et, à la fin du dernier, de vous écrier Alors, la suite, c'est pour quand !?[2]

Mais encore ?

Une histoire de bons qui luttent contre le mal absolu. Le premier épisode est, somme toute, assez classique[3] : présentation des personnages, révélation ou plutôt confirmation qu'il s'agit bien du Jésus, petit même, à côté de son acolyte, militaire chevronné, quelquefois désobéissant néanmoins[4], mission menée à bien, avec juste la dose de suspense qu'il faut pour ne pas s'ennuyer. Donc bien, mais pas plus. Dans le second épisode, l'auteur s'offre le plaisir de se vautrer dans l'univers d'un de ses écrivains préférés, H. P. Lovecraft. Avec des vrais monstres, à côté desquels Hitler est un méchant d'opérette, de l'horreur horrible, des situations totalement inextricables dans lesquelles on craint maintes fois de perdre les héros : ils sont quatre, maintenant, dont une héroïne malgré elle, qui se fera bien discrète par la suite. Le récit est un peu moins linéaire que dans le premier épisode, univers lovecraftien oblige, et malgré tout l'humour est très présent : en particulier, le sort réservé à Cthulhu est particulièrement comique. En tout cas, il m'a fait bien rire et m'a rendu le monstrueux poulpe plutôt sympathique[5]. Le troisième épisode nous transporte au Tibet, dans l'antre d'une créature mythique, que l'on sait être parfois bienveillante si l'on a lu Tintin. Cependant, poussée à des actions désespérées par la *onnerie humaine, elle se ligue avec le grand méchant pour sauver son peuple. Dans ce troisième acte, apparaît également une bien curieuse protagoniste, au comportement étrange, dont l'attitude devrait éveiller bien des soupçons : dotée de capacités formidables, elle n'est qu'une enjôleuse traitresse. Et puis l'abominable homme des neiges, l'impensable survient : un des héros disparaît ! J'ai ressenti la même tristesse infinie que si j'avais été soumise à l'effet du visi-sonor manipulé par Le Mulet. Le dernier épisode voit les principaux protagonistes encore valides partir à la rescousse du disparu. C'est très simple : il suffit de se faire emporter en Enfer, rien que ça ! Et c'est tellement fantastique et fantaisiste (au sens de la SFFF), que c'est inracontable...

Entrainé dans un récit aux prémisses linéaires, on se laisse prendre par un déroulé de plus en plus emberlificoté : rien ne sert de résister — on passerait à côté de l'histoire — il suffit de se laisser porter par les méandres tortueux de l'imagination de Neil qu'il a réussi à dessiner en mots. Écrite avant le Projet Bradbury, la saga porte déjà en germe le style précis, pas encore ciselé mais déjà bien profilé, qui s'épanouira à travers les prochaines 52 nouvelles. J'aime toujours autant la façon dont sont traités les personnages féminins, l'imagination « young adult », l'humanité que l'on trouve dans les œuvres de Neil Jomunsi.

Notes

[1] Objet Écrit Non Identifié.

[2] Pour bientôt, si j'ai bien tout suivi ici

[3] Si tant est que l'intrigue le soit...

[4] Il n'est qu'un humain, après tout.

[5] Et Dieu Jésus sait que j'ai une horreur viscérale des monstres.

24/08/2014 13:46

Projet Bradbury : impressions

bandeau-bradbury-actualitte.png

Le projet Bradbury (PB, pour les intimes) — qui n'en est plus un puisqu'en cours de réalisation, un peu moins de la moitié, un peu plus du tiers, au moment où j'écris ces quelques lignes — a été lancé en août 2013 par un écrivant — comme il le dit lui-même, ayant fait sienne la formulation de Martin WincklerNeil Jomunsi, un des noms de plume de Julien Simon — et un anagramme aussi... L'auteur a pris à la lettre les conseils de Monsieur Ray Bradbury : « Écrire un roman, c'est compliqué : vous pouvez passer un an, peut-être plus, sur quelque chose qui au final, sera raté. Écrivez des histoires courtes, une par semaine. Ainsi vous apprendrez votre métier d'écrivain. Au bout d'un an, vous aurez la joie d'avoir accompli quelque chose : vous aurez entre les mains 52 histoires courtes. Et je vous mets au défi d'en écrire 52 mauvaises. C'est impossible. »

Neil a eu l'excellente idée de proposer l'aventure à qui voulait bien s'abonner au projet et recevoir ainsi, en avant-première, une nouvelle chaque semaine. Un peu comme, en d'autres temps, on découvrait les romans de nos grands littérateurs publiés par épisode dans les journaux quotidiens. Et bien sûr cela lui permet de ne pas rester seul face à chaque nouvelle, de ne pas être tenté de la corriger, amender, modifier incessamment jusqu'à la rendre méconnaissable, puisqu'une fois parue, elle est à nous, lecteurs ; de recevoir des avis, critiques et impressions à chaque publication et d'avancer moins solitaire jusqu'à la prochaine station.

Je me suis abonnée en septembre. Et puisque l'auteur nous invitait dans son antre, je me suis autorisée à lui faire part de mes impressions, ci-dessous retranscrites, à partir de la septième nouvelle (par ordre antichronologique). D'autres avis sur le Projet Bradbury chez Natalia, Deidre, Jartagnan et Tulisquoi.

Les détails des nouvelles est ici et le bilan, .

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